En passant la septième, les allemands d’Unheilig gravissent la dernière marche qui les sépare d’une reconnaissance longue à venir mais amplement méritée. Cependant cette dernière marche annonce aussi du changement, dans quelle mesure ? C’est bien là le fond du problème.
En soit, ce n’est pas le changement lui-même qui est un problème mais les conséquences qu’il va avoir sur le groupe et sa musique.
Comme je l’évoquais dans la chronique de Puppenspiel, le changement de label avec le passage en major et donc l’augmentation des moyens mis à la disposition d’Unheilig, il y a fort à parier que Grosse Freiheit se démarque des autres albums.
Dès les premières notes, il est clair qu’on change de dimensions. La qualité du son, les arrangements et plus généralement les compos, tout indique qu’il s’est passé un truc. Déjà, il y a un vrai batteur en lieu et place de la boîte à rythme. Même si techniquement sur l’album ça ne change pas grand chose, il est évident que l’impact du bonhomme se fera sentir sur scène, ce qui est et reste le terrain de prédilection d’Unheilig.
Au fil des 16 titres de Grosse Freiheit, on constate avec bonheur que le groupe suit son bonhomme de chemin en profitant de ses nouveaux moyens. Prod aux petits oignons, avec un son plus chaleureux moins tinté électro, ce qui confirme le changement amorcé sur Puppenspiel de ce côté-là. Autre évolution notable, l’utilisation d’arrangements pour renforcer les chansons. Les choix sont judicieux, fichtrement efficace, privilégiant les instruments « classiques » comme le piano, les cuivres ou les cordes (du violoncelle notamment) – Sternbild est un monument du genre. A contrario, les grosses guitares ne sont plus trop de la partie. Si la guitare est toujours présente, elle se veut plus discrète, en soutient du reste. Certes de temps en temps, on lâche les chevaux comme sur la très « mansonienne » Abwaerts comme pour mieux la désamorcer en enchaînant sur un titre très atmosphérique (Halt Mich). Il est aussi intéressant de noter que l’album est particulièrement bien structuré avec des enchaînements judicieux pour ne pas lasser l’auditeur.
C’est ici que s’achève le concert de louanges, car malgré toute l’affection que j’ai pour le groupe, il y a quand même quelques bricoles qui me chiffonnent. Pour rester sur la structure de l’album, si celle-ci est bien calculée, on peut une nouvelle fois se poser la question de l’intérêt de mettre 16 titres. Certes, Unheilig ne se moque pas du monde mais sur la durée, ça tend à tirer en longueur pour pas grand-chose au final car 2/3 titres dispensables plombent le disque. L’autre chose qui plombe le disque selon moi c’est la surabondance de ballades. Certes c’est toujours fait avec goût (comme d’hab’ je garantis d’emballer en soirée avec des slows pareils), mais à trop peux varier les plaisirs, on se retrouve avec un disque un peu trop homogène et on en revient au problème de la lassitude lié à sa longueur. Le dernier point qui m’embête un peu c’est l’abus qui fait de certains arrangements. En effet, même si c’est efficace, Der Graf et sa bande nous resservent le même plat un trop souvent. Ceci dit, ils ont trouvé une recette qui fonctionne plus que bien (a en jugé par les chiffes de vente en Allemagne) et ils auraient grand tort de ne pas en profiter. Cependant il ne tient qu’à eux de ne pas trop tirer sur la corde histoire de ne pas tuer la poule aux œufs d’or.
Grosse Freiheit avait tout de l’album casse gueule pour Unheilig et on peut dire que même si tout n’est pas parfait, ils s’en sortent plutôt bien. Difficile à mon sens de faire un « Puppenspiel bis » tant la barre avait été placée haute. Ceci étant, Grosse Freiheit est un bon album. Et comme je le dis souvent aux groupies (HAHA) qui rodent dans mon entourage, un album moyen pour Unheilig ça fait un album mortel chez beaucoup de groupes. Imaginez que celui-là est « moyen-plus »…
Exigeant ? Moi ? Farpaitement !