Chroniquer un disque de Soulfly n’est jamais une chose facile. Il y a toujours les « pros » et les « anti » Cavalera. Donc pour celui là j’ai pris mon temps.
12, c’est le nombre de fois qu’il m’a fallu écouter ce disque pour pouvoir en parler avec un minimum d’objectivité.
La première écoute s’étant faite en compagnie d’autres amateurs de Métal au ton plus ou moins sarcastique. Ce qui n’aide pas pour l’objectivité vous en conviendrez. C’est donc avec un certain recul que je me suis replongé dans ce disque aux multiples visages pour voir si mes premières conclusions (et fous rires – oui j’avoue j’ai ris) étaient justifiés ou pas. Enfin je dis ça… c’est pour préparer le terrain quoi… donc moralité…
… le disques est multiple dans les styles qu’il mélange (reggae, flamenco, musique traditionnelle des Balkans et métal), multiple dans son approche (hyper mélo chiante ou bien agressive), multiple dans l’auto plagiat et la répétition tant musicale que lyrique.
C’est l’éternel problème de Soulfly depuis leur premier opus. Les compos se ressemblent toujours plus ou moins et les paroles ne sont que des anagrammes les unes des autres. Les 5 premiers titres, qui sont de loin les plus musclés, sont un habile re-mixage des meilleures chansons de Chaos AD et Roots, illustres albums d’un groupe dont on doit taire le nom quand on parle de Soulfly. Vous leur ajoutez une touche typiquement soulflyenne et vous savez à quoi vous en tenir.
Bref passons sur ces points prévisibles pour nous intéresser à ce qui fait que ce quatrième album est ‘différent’ des 3 précédents.
De mon point de vue Prophecy se divise en 2 parties : les 5 titres dont j’ai parlé plus haut qui constituent la partie débridée du disque – et toutes les chansons suivantes qui se veulent plus complexes, plus mélodiques et surtout beaucoup plus longues.
Si sur la première partie, on atteint péniblement les 4 minutes, dans la seconde on part pour 6 à 7 minutes… et le temps vous paraîtra long quand Marc Rizzo se mettra à la sèche pour des passages typés flamenco ou bien qu’un orchestre croate vous fera profiter de son « langoureux » duo avec Maxou. Oui c’est très bien interprété, oui ça change mais non ça ne casse pas 3 pattes à un canard.
Les morceaux de cette seconde partie suivent plus ou moins le même schéma avec une intro hyper mélo, quelques passages plus rythmés puis une outro qui par en sucette. Pour l’outro vous aurez donc au choix du flamenco, du reggae (ouais carrément) ce qui donne au disque des accents de world music pas déplaisant mais qui me semble un peu hors contexte sur un disque de métal. Quoiqu’il en soit on ne peut que saluer le fait que Maxou ait (enfin) un peu d’audace dans ses créations. Cependant ces idées sont un peu maladroites dans leur réalisation (selon moi) et certaines avaient été initiées en d’autres temps sur les albums d’un autre groupe mais jamais dans de telles proportions. Là ou pour moi ça pêche vraiment, c’est que justement sur ces fameux disques, ces petites touches apportaient un plus alors que là on a l’impression qu’il en met pour en mettre à tel point qu’on frise l’overdose et qu’on quitte carrément le registre du métal.
Vous me direz que je suis peut-être obtus et que je descends Soulfly pour le fun là où certains verront du génie, de la créativité et diront que Maxou n’a jamais été aussi visionnaire. CA SE DISCUTE, c’est clair mais ce n’est pas le propos du moment.
Il est aussi intéressant de voir que sur cette partie, Maxou a ressorti de son placard des influences qu’il avait laissé de côté depuis longtemps (notamment les Bad Brains et Fishbone).
Un petit mot sur la prod du bestiau. C’est clean sans être transcendant mais ce qui pêche c’est le mixage, qui est particulièrement mou du genou – il est où le Andy Wallace qui a produit Pantera ? Gloria l’a séquestré dans les chiottes du studio ou quoi ? On a l’impression que Joe Nuñez fait de la présence derrière les fûts et que la basse de Bobby Burns n’est pas branchée. Tout à fait l’opposé de celle de Dave Ellefson qui vrombie dans les morceaux sur lesquels il joue – à croire qu’il y a une close spéciale à ce sujet dans son contrat. Bref prions pour que le mixage soit tout sauf définitif parce que là ça n‘est même pas digne de Soulfly.
Donc au cas ou vous n’auriez pas remarqué : ce nouveau Soulfly me laisse totalement de marbre. Le délire tribal de Max – bien qu’en partie renouvelé ici – commence à tourner un peu en rond et à quitter le registre du métal pour lorgner vers de la world music plutôt musclée certes mais de la world music quand même.
Peut-être que les malades atteints de cavalerite aigue y trouveront leur compte mais les kids – qui sont le public de base de Soulfly – risquent de rester perplexe à l’écoute de l’album… ou alors ils adoreront (sont tellement imprévisible les d’jeunes de nos jours).
Au final, ne retenez que ça : la Prophecy se réalisera le 30 mars, pour le reste, à vous de voir.