Il y a des disques qui changent une vie, qui donnent des vocations, qui ouvrent de nouvelles perspectives… America’s Least Wanted est de ceux là. Dur dur pour moi de parler du disque qui m’a permis de mettre au « hard » comme on disait à l’époque.
Parce qu’il faut bien commencer quelque part, j’ai commencé à écouter du chevelus avec ce disque, découvert par hasard lors d’un cours de musique (oui oui en cours de musique) en 1992 si ma mémoire est bonne, ‘fin bref c’était au siècle dernier et à la rigueur on s’en fout.
En pleine période grunge avec sa cohorte de groupes dépressifs arrive cet ovni californien à l’humour pipi/caca totalement assumé avec le cheveu gras et le rot facile de rigueur. Le comble de la « rebellitude » en ce temps là.
Ce qui fait que ça a marché ? Cet humour « Wayne’s Worldien » et ce groupe qui tape dans tout un tas de registre – du métal (Panhandlin Prince) au glam (Don’t Go) en passant par le folk (Mr Recordman) avec un talent certain et une insouciance assez inouïe, tout ça avec un côté sale gosse cynique à souhait – il suffit d’écouter les paroles de Whit Crane pour s’en rendre compte et se tordre de rire.
Alternant la guitare grasse (Come Tomorrow), le hit en puissance (l’inoxydable Everything About You) et la ballade imparable pour chopper (Cat’s In The Cradle – tester et approuver), Ugly Kid Joe fait preuve d’une maturité à toute épreuve sous son côté joyeusement bordellique. Maturité que le groupe confirmera avec Menace To Sobriety, second opus injustement boudé car plus sombre et plus sérieux. Ajoutez à cela quelques guests de luxe : le « metal god » Rob Halford qui fait les chœurs et Dean Pleasant (Suicidal Tendencies) qui vient poser un solo, soutenu par une prod d’une qualité incroyable et vous obtenez America’s Least Wanted.
Cela dit, ce disque ne serait rien sans les musiciens de qualité qui y ont contribué. A tout seigneur tout honneur : Whitfield Crane, chanteur exceptionnel à la très large palette vocale. Après le split du groupe, il continuera sa carrière chez Medication (avec Logan Mader) puis Life Of Agony avant de figurer parmi les candidats à la succession de John Bush chez Anthrax. Cordell Crockett, bassiste au style incroyablement varié qui passe du slap au médiator avec une déconcertante facilité et gros adepte de la wah-wah, il donne au groupe un groove incomparable – écoutez donc Same Side pour vous en convaincre. Et puis il y a Dave Fortman, oui je parle bien du Dave Fortman qui a produit Evanescence et leur a permis de vendre des camions avec l’excellent son qu’il leur a pondu. Le guitariste a également à son tableau de chasse de producteur Mudvayne, Superjoint ritual et accessoirement le dernier Slipknot en date : All Hope Is Gone.
Pour en revenir au disque, même si le ventre mou du disque est un chouilla plus faible au niveau des compos, ça n’en demeure pas moins fichtrement efficace et prenant. Bref vous l’aurez compris, je suis archi fan !
America’s Least Wanted est à l’épreuve du temps. Plein de bonnes idées, varié, la pop y cohabite avec le hard et chaque titre est quasiment un hit en puissance. Même si la prod ou certaines compos trahissent parfois son âge, il reste un « must have ».