Sacré Philou! Toujours présent sur la scène mais surtout très souvent là où on ne l’attend pas artistiquement. Le moins que l’on puisse dire c’est que cette fois-ci il est parti encore plus loin que d’habitude (musicalement s’entend).
Qu’on apprécie ou pas l’homme qu’est Phil Anselmo est une chose. Mais si il y a bien un chose sur laquelle est il quasi intouchable c’est sa versatilité et la diversité de son « univers musical ». Vous l’avez connu en showman de tous les excès avec Pantera, un peu plus intimiste (toutes proportions gardées) avec Down, en chanteur de Black avec Scourge ou Viking Crown, en Mike Patton du Bayou pour ses expérimentations avec The Illegals… maintenant vous l’avez en avatar de Johnny Cash.
Oui rien que ça. Car dans ce disque au nom à rallonge, l’ombre du grand Johnny plane sur quasiment chaque titre. Stylistiquement on est cependant plus dans l’esprit d’un Folk très sombre qui renvoie à King Dude (lui influencé par Cash) et dans une moindre mesure à ce qu’a voulu faire Nergal avec son projet Me And that Man.
Le projet est né en 1993 de jams chez Anselmo avec divers musiciens, comme ça juste pour le plaisir. Ce n’est qu’en 2012 avec la rencontre de Steve Taylor (Woven Hand) et la participation de Kevin Bond (Superjoint Ritual) que le projet va vraiment prendre forme. Phil s’adjoint également les services de son bro Jimmy Bower (Down) ainsi que d’un violoncelliste, d’un claviériste, d’un bassiste et d’un percussionniste. Le tout sera bien entendu enregistré dans le Nodferatu’s Lair Studio de Phil.
Puisant son inspiration dans l’enfance de Phil, chaque chanson est empreinte de mélancolie et semble refléter une certaine partie de la vie d’Anselmo dans son aspect descente aux enfers. La déception, l’ennui voir le désespoir viennent souvent à l’esprit à l’écoute de l’album. Et les paroles ne sont pas non plus d’une folle gaîté. En un sens, En Minor est une sorte d’exutoire qui permet à Phil de faire face à certains des démons qui ont fait de lui ce qu’il est. Il semble évident que l’homme a été touché et que l’artiste n’en est que le reflet. Un artiste qui continue de prouver l’étendue de sa palette en posant sa grosse voix sur cette musique d’une tristesse infinie. A croire que l’artiste et l’homme avaient besoin d’En Minor pour enfin être complet.
Phil capte bien entendu toute la lumière mais ce qui se passe derrière lui n’en mérite pas moins de l’attention. Dès les premières notes du disque, on sait où l’on va et à priori comment on va y aller avec ces quelque accords de guitare acoustique. Ce sera sombre. Les quelques envolées plus Rock se verront vite calmées par des arrangements venant rappeler qu’on n’est pas là pour s’amuser. quel que soit le registre tutoyé, Jazz ou Folk, il y a toujours quelques choses dans la musique qui nous renvoie à la réalité. Que ce soit les choeurs, les rythmiques, des cordes dissonantes ou quelques notes de slide guitar. Bref un travail absolument bluffant de la part des musiciens qui s »accordent parfaitement avec la voix et la teneur du propos d’Anselmo.
En soit En Minor n’apporte rien de nouveau. Ici le propos semble juste être pour Phil de se montrer encore une fois une facette de sa personnalité et ce qu’il est capable de proposer. Si certaines de ses prises de risques sont parfois discutables, celle-là ne souffre d’aucune contestation. Du grand art.
NB: l’album date de l’été 2020 et j’ai complètement loupé sa sortie alors qu’il était pourtant sur ma liste de disques à surveiller. Toutes mes confuses pour cette erreur qui est désormais réparée.