3 ans, il aura fallu attendre 3 ans avant de voir revenir sur le devant de la scène un des groupes les plus décriés du Métal actuel : Slipknot. Le gang de l’Iowa est de retour avec un troisième album que le groupe a vanté comme le Dark Side Of The Moon du Metal… comme d’habitude beaucoup de blah blah blah pour arriver à quoi ? C’est ce que nous allons voir.
6 mois d’enregistrements, des titres réécrits à la demande du producteur, Rick Rubin, des engueulades à n’en plus finir entre les membres, des rumeurs tenaces annonçant la fin du groupe, le moins que l’on puisse dire, c’est que Vol.3 aura été accouché dans la douleur. Alors la montagne Slipknot a-t-elle accouché d’une souris ?
Et bien en fait oui et non.
Oui car…
D’un certain point de vue, on pouvait s’attendre à autre chose qu’à du Slipknot édulcoré. La haine qui se dégageait des opus précédents semble disparue, cette rage tout juste contenue qui nous était envoyé à la figure au travers de paroles d’une exquise finesse (sic) est passée aux oubliettes. De même, la musique en elle-même est différente. Certains y verront peut-être la (mauvaise ?) influence de groupe comme Stone Sour, surtout au niveau du chant, mais le fait est que l’ensemble manque de cohérence. Chaque morceau semble être un savant patchwork de partitions composées à droite ou à gauche sur un coin de table ou dans l’urgence. Les partitions de batterie supra agressives semblent être en complet décalage avec les riffs (d’ailleurs assez peu inspirés malgré de bonnes trouvailles), les passages accoustiques ou bien encore les samples. Cet avalanche de percussions surmixées (la pédale qui claque c’est sympa 2 minutes mais ça soule vite) donne l’impression d’être là pour cacher le vide des riffs et la platitude de la basse. Ce ne sont pas les quelques solos, pourtant d’influence « slayeresque », qui sauveront quelque chose de tout ça.
Le Slipknot d’avant est mort, vive Slipknot.
Non car…
D’un autre côté, Vol.3 représente quand même un sacré challenge. Avoir les « corones » (avec l’accent svp) de pondre un album comme ça après un disque comme Iowa et surtout après un silence de 3 ans occupé pour moult projets, rumeurs et vacheries en tout genre. Là je dis bravo.
De plus, comme chaque album du groupe, Vol.3 nécessite plusieurs écoutes afin d’être assimilé. Au premier passage dans le casque, ça semble confus, pas structuré, pour ne pas dire franchement bordellique et seulement un ou deux titres retiennent votre attention. C’est seulement après 5/6 passages que l’album se révèle vraiment, du moins sur certains titres.
Sa structure, similaire à celle de ses 2 prédécesseurs (à savoir – intro, 3/4 titres qui blastent, 2/3 titres plus posés voir torturés, 1 chanson bien lourdingue et un final à rallonge avec son ambiance de morgue), qui pourrait être vu comme un point faible est en fait une des forces du disque. On n’est en effet pas dépaysé et l’on sait où aller chercher le morceau qui nous fait tripper. Pour ma part, comme sur les 2 précédents, je zappe la première moitié pour me diriger très vite vers la fin où, comme d’habitude, sont stockées les merveilles. Sur Slipknot on avait Purity, Prosthetics, Scissors, sur Iowa il y a eu Gently, Skin Ticket ou bien encore la chanson titre. Ici on se fait plaisir avec The Nameless, The Virus Of Life, Vermilion (avec son riff piqué à Machine Head), c’est torturé, lourdingue, crade, glauque, malsain, y’a des percus de folie, Craig envoie des samples hallucinants, bref c’est du Slipknot 100% pur jus. Car oui, pour moi la moitié d’un disque de Slipknot est à zapper. L’album lui-même ne se résume pas à 3 pauvres titres bourrins qu’adore un large public un peu « faible d’esprit » dirons nous (je sais que je vais me faire sabrer pour cette dernière remarque mais j’assume) et qui s’arrête d’écouter un disque une fois la cinquième chanson passée. De toute façon c’est bien connu, les meilleures chansons d’un groupe sont celles qui sont rarement jouées en live, ça vaut pour Slipknot comme pour beaucoup d’autres groupes.
D’autre part, les titres ayant filtré sur le net avant la sortie du disque sont ici beaucoup plus digestes. En effet, remise dans son contexte, Duality, qui est limite insipide en clip, prend ici toute son ampleur, Pulse Of The Maggots remet une couche de brutalité au milieu des titres barrés avec du Slipknot typique.
Bref, Vol.3 constitue un beau challenge sur le plan musical. Son côté patchwork évoqué plus haut, bien que déroutant, apporte quelque chose de nouveau à la musique. Même si je maintiens que la surenchère de batterie nuie à l’ensemble, le chant posé apporte un bouffée d’air frais sans pour autant faire de Corey un Mike Patton en puissance. L’apport des solos, même si ils ne sont pas extraordinaires, changent la donne et montre une volonté d’ouvrir la voix à de nouvelles expérimentations. De même, la mise en avant au mixage des percus, samples et autres scratchs montre que les leçons du passé ont été retenues. Un disque mur et travaillé malgré les apparences.
Malgré cette review paradoxale je l’admets, Vol.3 récolte 4/5. Non pas parce que c’est l’album de l’année – pour tout dire je le trouve un peu moins bon qu’Iowa, qui lui-même n’arrive pas à la cheville de l’éponyme – mais pour la prise de risque. Slipknot aurait pu continué sur sa lancée et finir de tout défoncer sur son passage. Au lieu de ça, le groupe prend le parti d’offrir un disque un peu barré, à l’ambiance assez spéciale et surtout ose casser cette image de gros ploucs sans cervelles qui ne savent faire que du bourrin. A savoir si maintenant ils ont une cervelle, c’est un débat que je n’entretiendrais pas, en tout cas ils ont prouvé qu’ils pouvaient varier les plaisirs. Le résultat est étrange, mais fort intéressant.
Roooh pi c’est Slipknot quoi merde ! On aime ou on n’aime pas…